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  • Masiosarey

Quand D. Trump est victime d'une "fake news" sur le Mexique


En mai dernier, sortait un rapport qui allait faire beaucoup de bruit au Mexique! Et ce d'autant plus qu'il a été repris par le président D. Trump. Petit retour sur l'Affaire, alors que le débat sur les "fake news" fait rage...

9 mai 2017 : le rapport

Tous les printemps, l'Institut international pour les études stratégiques (IISS pour ses sigles en anglais), basé en Angleterre, publie un rapport annuel sur les conflits dans le monde, Armed conflicts survey. Et cette année, à la surprise générale –et en premier lieu celle du directeur de l'IISS ("This is all the more surprising..."*)– le Mexique se hisse à une honteuse deuxième place parmi les 37 zones de guerre les plus violentes de la planète, juste derrière la Syrie.

Emotion (knock out plutôt) dans les médias mexicains et les réseaux sociaux, qui reprennent immédiatement la nouvelle et la diffusent sans plus d'enquête. Dès le 9 mai, La Jornada et Forbes Mexico relaient le communiqué de presse de l'IISS; Publimetro, qui s'est tout de même procuré le document, expose les conclusions de l'expert de l'Institut, Antonio Sampaio; El Universal, pour sa part, précise que le rapport se base, en ce qui concerne les déplacés, sur les chiffres de la Commission mexicaine des droits de l'homme (CNDH).

Avec la prudence et la diplomatie qui le caractérisent, le président Nord-Américain, Donald Trump, apporte évidemment sa pierre à l'édifice, en retweetant derechef la note publiée par CNN à propos du rapport.

10 mai : "Non, Mexico n'est pas le second pays le plus violent au monde" (El Economista)

Mais, dès le lendemain, le Ministère des relations extérieures mexicain dément la nouvelle. Le principal argument mobilisé est celui de la source utilisée par l'IISS : le chiffre du nombre de morts dans le conflit qui oppose les groupes criminels aux autorités mexicaines ne correspond pas exactement pour 2016 à celui de l'INEGI. En se basant sur les chiffres de l'ONU de 2014, le gouvernement estime même que le Mexique affiche un taux d'homicides en deçà de celui d'autres pays de la région, tels que le Honduras, le Venezuela ou le Brésil...

Et certains leaders d'opinion mexicains s'engouffrent dans la brèche ! C'est le cas de Alejandro Hope dans El Universal qui, dès le 15 mai, décortique les données utilisées par l'IISS. Intelligemment, il ne discute pas les chiffres avancés. Au mois d'avril, ce même spécialiste des questions de sécurité avait d'ailleurs publié un commentaire exhaustif des chiffres d'homicides du premier trimestre 2017 : probablement le pire trimestre depuis les années soixante-dix! (El Universal). En revanche, Alejandro Hope conteste le principe du classement et met en évidence les failles du rapport à ce propos.

The Guardian, plus prudent que la presse mexicaine, offre dès le 11 mai une mise en perspective du rapport anglais. Le vrai problème, conclue le quotidien, est de savoir si le Mexique doit être considéré comme une zone de conflit. Et de citer un spécialiste mexicain des questions de sécurité : “si le Brésil –qui a enregistré quelques 50.000 homicides en 2016– avait lui aussi formellement déclaré la guerre au crime organisé, l'IISS l'aurait-il inclus dans son rapport?”...

Finalement, le 12 mai, l'IISS, dans un communiqué de presse, explique pourquoi il a décidé de classer le Mexique parmi les pays "en conflit". L'institut met principalement en avant la durée des affrontements entre "forces de l'ordre" et "délinquants" (des premiers déploiements de l'armée en 2006 à nos jours) et, surtout, la menace que fait potentiellement peser le crime organisé sur la sécurité intérieure du pays (même si, ajoute l'IISS, l'Etat mexicain a récemment marqué des points en "fragmentant" les cartels les plus puissants),

23 juin 2017 : erratum

Une nouvelle en déplaçant une autre, la polémique aurait pu en rester là. Pourtant, le 23 juin, dans un discret communiqué, l'IISS reconnaît un problème méthodologique dans l'estimation de la violence liée au conflit en cours au Mexique. Le communiqué conclut en annoncant que le rapport 2017 comprendra un point méthodologique...

Mais (au-delà de raisons purement marketing) pourquoi faire rebondir la polémique?

Parce que la veille, le 22 juin, Donald Trump tweetait l'information suivante :

Un comble pour ce fan du commentaire à chaud! Il aura mis un mois avant de faire la relation entre cette (honteuse) deuxième place du Mexique et la construction de son mur... Et entre temps, la nouvelle faisait déjà partie des "fake news"...

©Masiosarey, 2017

 

*Press release, IISS, Armed conflicts survey.

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