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"Que des emmerdes, je le savais". La chèvre, 1981

Quand Pierre Richard et Gérard Depardieu se retrouvent au Mexique, cela donne La chèvre, film de Francis Veber, sorti en France en 1981.


Affiche de la Chèvre, 1981

L'idée de départ est simple, légèrement tirée par les cheveux et efficace : la fille d'un industriel français, connue pour sa grande malchance, est enlevée alors qu'elle passe ses vacances au Mexique. Un couple que tout oppose, incarné par Pierre Richard (alias François Perrin) et Gérard Depardieu (alias Campana), se lance à sa poursuite entre Mexico, Acapulco et Puerto Vallarta. Campana est un pro ; Perrin, lui, est un "pisteur" malgré lui. Tout aussi maladroit et malchanceux que la jeune fille, il est censé suivre ses pas en tombant dans les mêmes pièges qu'elle...

Cette comédie populaire a connu un immense succès en France, dépassant même au box office les entrées du premier opus d'Indiana Jones. Le couple Pierre Richard/Gérard Depardieu fonctionne à plein régime et le spectateur suit avec délices les péripéties de Perrin dans le Mexique de la fin des années soixante-dix.

Entièrement filmée au Mexique, cette co-production franco-mexicaine (Gaumont-Fideline Films et CONACINE) s'ouvre sur un impressionnant panorama de la baie de Puerto Vallarta (n'est ce pas plutôt Acapulco?), à la poursuite d'un parachute ascensionnel. Et c'est la baie des années soixante-dix qui défile, ses quelques immeubles isolés et les collines parsemées de verdure. Le contraste entre la grisaille parisienne et la luminosité tropicale est frappant.

Des acteurs en grande forme

Les deux protagonistes du film s'entendent à merveille. C'est une chance car Veber penchait au départ pour que Jacques Villeret interprète Perrin et Lino Ventura, Campana. La chèvre est la première incursion de Depardieu dans la comédie. Dans un entretien pour compléter la version DVD du film, le réalisateur raconte les péripéties du tournage : un Pierre Richard très amoureux d'une fille "qui était un peu difficile" et un Gérard Depardieu, grandiloquent sous l'effet de l'alcool. Francis Veber est en particulier marqué par une scène où notre Gégé national s'effondre en maillot de bain dans le bar de l'hôtel. "Quatre ou cinq petits mexicains sont arrivés et ont essayé de le remettre sur pied", raconte Veber, sans succès, sous 40ºC. S'ensuit une altercation entre l'acteur et le cadreur "... et les cinq mêmes petits mexicains surgissent de nulle part avec des balais pour ramasser les débris de verre". Quand un grand réalisateur français découvre le service hôtelier mexicain!

Du côté des mexicains, Pedro Armendariz Jr. est impeccable dans le rôle du chef de police d'Acapulco, avec sa guayabera en nylon, concession au progrès dans ces années soixante-dix. L'acteur Jorge Luke a cette ligne géniale au moment où il meurt sous les balles de ses complices: "Que des emmerdes, je le savais...".

Que nous apprend La chèvre ?

Les voitures étaient forcément, à l'époque, d'énormes berlines carrées américaines. Les gangsters mexicains avaient une moustache et des chaînes en or autour du cou. La prostituée mexicaine est, bien entendu, blonde aux yeux bleus et dans la jungle, les dispensaires étaient tenus par des religieuses...

La décoration des hôtels incluait obligatoirement des éléments culturels pré-colombiens, comme les calendriers aztèques... On apprend également, en même temps que François Perrin, qu'il y a beaucoup de "bordels au Vénézuéla", et qu'il n'y a pas de sables mouvants dans "cette zone" du Mexique.

Quelques incohérences franco-mexicaines

La musique, unique, du film, composée par Vladimir Cosma, n'emprunte pas grand chose à la culture musicale mexicaine. Il y a bien entendu une guitare, un rythme qui nous en rapproche, mais la flute nous renvoie plus sûrement à la zone andine.

En guise de lama, c'est un gorille qui surprend Perrin vers la fin du film... la scène est d'autant plus cocasse qu'elle est bien évidemment improbable. Un serpent menace Campana. Ce naja aurait été amené de Suisse, mais se serait malheureusement enfuit dans la jungle mexicaine (Allocine) ; la magie du ciné, qui introduit de nouvelles espèces animales au Mexique !

La géographie du film est, quant à elle, impénétrable. Au début du film, la jeune Marie Bens se trouve dans un hôtel à Puerto Vallarta (Acapulco ?), puis sort se balader tout naturellement dans un quartier qui ressemble plutôt au San Angel de Mexico, avec ses rues pavées. Campana et Perrin, obligés de faire une étape imprévue à Acapulco, se retrouvent dans le même hôtel où était logée la petite Bens à Puerto Vallarta.

La police d'Acapulco est particulièrement efficace et les gangsters parlent parfaitement le français...

Alors, pas crédible, La chèvre? Qu'importe, le film reste l'archétype de la comédie populaire française des années quatre-vingt qui continue de nous arracher des larmes de rire...

©Masiosarey, 2019

 

Pour en savoir plus: Emission de la RTS, Travelling - Publié le 06 janvier 2019

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