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  • Masiosarey

Plaidoyer pour un Halloween mexicain


Qui pourrait imaginer une seule seconde que cette rue d’un quartier tranquille de Mexico sera, dans quelques heures, envahie par une horde de zombies ? Au couché du soleil, monstres, morts-vivants, écorchés vifs, trucidés, décapités, fantômes, vampires y fourmilleront… à faire pâlir d’envie n’importe quel suburb nord-américain.

©Masiosarey, 2017

Il y a un quartier à Mexico qui ne badine pas avec Halloween ! Et pour qui en douterait, voici le témoignage, en exclusivité pour Masiosarey, de la seule, l’unique, l’irremplaçable, Maléfica !

Avis aux récalcitrants ou aux irréductibles opposants à la marchandisation de la fête anglo-saxonne d'Halloween ! La lecture de cet article peut sérieusement ébranler quelques certitudes. Et pour les inconditionnels de la nuit des sorcières, à Mexico, c’est dans ce quartier qu’il faut aller ! Papitos y mamitas, comme diraient mes instistutrices favorites, n’hésitez plus à amener vos bambins prendre un bain de foule, connaître la vraie Maléfica et, accessoirement, assister à une véritable et authentique fête de quartier!

©Angélica R.

Car si vous ne le saviez pas encore, Maléfica (la méchante sorcière de la Belle au bois dormant) habite à San Pedro de los Pinos. Et comme elle n’est pas si méchante, chaque année depuis 18 ans, elle offre des bonbons aux enfants qui viennent le lui demander : a 20h sonnantes, tous les 1er novembre, Pourquoi le 1er novembre et pas le 31 octobre, qui est le jour de Halloween ? « Les mamans au fil des années, m’ont demandé de changer la date, car au Mexique les enfants n’ont pas école le lendemain (2 novembre) et peuvent donc veiller tard le 1er » explique Maléfica.

©Masiosarey, 2017

Halloween à San Pedro de los Pinos est née de l’initiative d’une famille et surtout d’une maman, Angélica, qui, alors que ses enfants sont encore petits, décide de se déguiser, de préparer des petits sacs de bonbons et de les distribuer gratuitement aux enfants : « Je voulais que mes enfants aient le plaisir de donner des bonbons aux autres enfants. On m’a inculqué l'esprit de la fête des morts dans ma famille. Le 1er novembre précisément est le jour des enfants défunts. Or, j'ai perdu une petite sœur. C’est donc un peu un hommage que je lui rends. La fête d’Halloween se prête à ce que les gens se déguisent ». Et elle ajoute: «Nous avons commencé avec à peu près cinquante sachets. Peu à peu, le bouche à oreille a fonctionné et les familles sont venues de plus en plus nombreuses. ».

Car la traditionnelle distribution de bonbons a pris une ampleur inimaginable. « Une année, un voisin m’a dit qu’un camion entier d’enfants venait d’arriver. Mon mari s’est précipité au marché et a rapporté tous les bonbons qu’il a pu. Nous avons continué la distribution par poignées », raconte-t-elle. « Parce que Maléfica ne peut pas refuser des bonbons aux enfants qui ont attendu ! ». Et, contrairement à sa mauvaise réputation, Maléfica aime aussi les animaux de compagnie. Elle distribue ainsi des sacs spéciaux pour les petits chiens... à condition de venir déguisés!

Maléfica et sa famille ©Angélica R.

Toute la famille met la main à la pâte pour la préparation, mais aussi pour la distribution du 1er novembre. Et la famille de Maléfica, elle fait peur : parfois c’est Dracula en personne qui vient l’épauler, ou un squelette terrifiant (qui est en fait sa maman), ou encore quelques fantômes…

En 18 ans, Maléfica n’a manqué son rendez-vous qu'à deux occasions : la première à cause d'un décès dans la famille, une autre fois parce qu’économiquement elle ne pouvait assumer ce coût. Le succès est tel que ce ne sont pas moins de 800 sachets bien remplis qui sont élaborés : « Une année, les locataires du marché ont coopéré pour l’achat des bonbons. Depuis quelques années, un ami nous offre aussi des ballons » ajoute-t-elle. « Mais la famille assume la majeure partie des coûts ».

« L’affluence est telle que nous avons organisé une file, pour éviter les débordements et les disputes. Un jour, le voisin qui s’occupe du Comité de voisins, est venu me voir et m’a demandé si je voulais que la rue soit fermée. Bien évidemment ! lui ai-je répondu. C’est pourquoi, depuis, vers 18 heures, au moment où les gens commencent à faire la queue, j’appelle la police qui vient fermer l’Avenida ». La sécurité est importante pour Maléfica, car c’est la clef de cette ambiance bon-enfant. La rue se remplit en fin de journée et, vers 20h00, non seulement les familles se pressent en quete de bonbons, mais des badauds déguisés, s’amusent à faire peur aux enfants. Puis la foule commence à crier : « Maléfica, Maléfica, Maléfica ».

« Au début, explique Maléfica, je changeais de costume chaque année. J’ai été une horrible vieille sorcière, une autre fois, la méchante marâtre de Blanche Neige… Mais les enfants veulent Maléfica. Pour eux, ici, c’est la maison de Maléfica ».

©Masiosarey, 2017

Et les voisins prennent le plis, Depuis 5 ou 6 ans, la maison d’à côté se transforme pour l’occasion, en maison hantée*. Un peu plus loin, une autre famille exhibe depuis un an un splendide autel pour les morts. L'initiative fait des émules et la rue risque fort de devenir la "rue de Halloween" à Mexico!

Enfin, lorsque nous demandons à Maléfica ce qu’elle retire de cette expérience et pourquoi elle y investit tant d’argent et de temps, elle sourit et réplique : « C’est beau de voir la convivialité qui s’établit entre les parents et les enfants. Je vois bien que les enfants sont ravis que leurs parents se déguisent aussi et jouent le jeu ! C’est de ça qu’il s’agit au final ! ».

Calle 17 San Pedro de los Pinos

Voilà la preuve, le temps d'une nuit, que la générosité individuelle est le terreau de la vie de quartiers dans une mégalopole. Sans renfort de marketing et sans aucun soutien institutionnel, un quartier s’anime, les voisins se retrouvent et les générations cohabitent. Autour d'un café ou d'un pain des morts... celui de la pâtisserie du quartier, Alebrijes, sans l'ombre d'un doute!

Et pour reprendre une expression québécoise** : on est tombé en amour avec cette famille et cette célébration !

©Masiosarey, 2017

 

*Nous ne savons pas à l'heure où nous publions cet article si cette année encore la maison hantée sera de la partie!

**Merci Alecq Tochtli

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