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  • Masiosarey

… voir la finale de l’Euro 2016 France-Portugal dans un marché mexicain


Jour de foot, jour de fête…

J’aime mon marché de quartier le jour de matchs décisifs.

Tous, je dis bien TOUS les commerçants allument la télé. Les bruits habituels du marché sont mis en sourdine pour laisser la place aux voix des commentateurs sportifs. Le tout accompagné du bruit de fonds des spectateurs du stade.

Les gens viennent manger ou plutôt petit-déjeuner tardivement, surtout lorsque les matchs se jouent en Europe. Alors, autant vous dire que c’est le marchand de barbacoa qui a foule ces jours-là. Bon, bien entendu, la tension presque physiquement palpable est loin d’être, aujourd’hui, celle de l’époque des grands matchs de l’équipe nationale mexicaine. Mais quand même, un petit frisson nous saisit lorsque l’on rentre dans une cathédrale de la bouffe, pour un jour dédiée aux dieux du foot.

Ce jour-là, on pardonne au serveur qui a le regard scotché sur la dernière action de son équipe plutôt que sur votre assiette vide. On pardonne au marchand de poulet qui ne découpe pas assez vite votre « milanesa », mais qui se rattrape grâce à un commentaire savant sur la défense de l’équipe adverse. Tout le monde sait bien qu’il y a un « directeur technique » qui sommeille, pas très profondément d’ailleurs, chez tout mexicain en âge de produire un discours cohérent.

Aujourd’hui, c’est décidé : j’y vais avec mon sweet « Allez la France », acheté en solde à la Commercial mexicana. Ce n’est pas comme si mes commerçants préférés ne savaient pas que j’étais française, après tant d’années dans le quartier. Mais il faut bien de temps en temps céder au folklore. Et si la maîtresse de l’école de ma fille se balade avec une veste «Allez la France », tous les jours de l’année, pourquoi pas moi, pas vrai ? Peu habituée à une démonstration aussi ostentatoire de ma nationalité, et surtout vu mon degré plutôt faible de passion futbolera, je déambule un peu gênée dans les couloirs du marché pour choisir l’endroit où je pourrai savourer une bonne Corona (puisqu’en France c’est à la mode) … et voir la dépotée que la France va mettre au Portugal !!!!

« Aaaalleeeez les Bleuuuuuus ! » crie une petite fille à côté de moi. Oh mince, c’est la mienne qui, à 6 ans, veut faire comme sa maman ! Cette même petite fille qui pendant des années a pensé que football en espagnol se disait « Pumas » (la faute au papa qui dès le berceau lui a inculqué le droit chemin universitaire). J’avoue : à ce moment j’ai un peu crains le ridicule de la déroute : moi, en tee-shirt « Allez la France », sortant du marché avec ma petiote déçue, sous le regard condescendant de tous mes commerçants, qui la semaine prochaine encore me jetteront le même regard de pitié : « C’est pas grave, ce sera pour la prochaine fois ! »… « En même temps ils sont arrivés jusqu’en finale, c’est pas mal »...

Mais restons positifs. Voilà le coup d’envoi est sifflé, ça y est la partie commence, le marché entier est tendu pour voir qui réalisera la première action. Les commentaires en espagnol (je dois dire nettement plus inventifs que les français) se succèdent : « El esférico está del lado Francés ! »

Dire que pendant des années j’ai cru que El esférico était le surnom d’un joueur ! Dans la chaleur du match (ou ne serait-ce pas plutôt le stand voisin de parrilla argentine qui nous réchauffe ?), les bières sont bienvenues. Le public est à la hauteur du match, ennuyé. Grâce à un arrêt spectaculaire du gardien de but LLoris, j’apprends malgré tout une nouvelle expression mexicaine : « Le quiso poner crema a los tacos ! » Phrase énigmatique qui signifie qu’il a voulu « faire le beau », qu’il a exagéré.

Et puis tout d’un coup, une petite voix s’élève : j’ai envie de faire pipi ! (à vrai dire, le seul inconvénient de choisir un marché de quartier comme lieu de visionnage). A deux minutes de la fin, juste au moment où le futur mexicain André-Pierre « Guignac » rate le but de sa vie, nous devons revenir à la maison à toute allure. Sur le chemin du retour, gooooooool, et voilà, nous n’avons pas vu le but de la défaite.

©Masiosarey 2016

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